L’univers socio-professionnel du surf est entré en crise, en un glissement progressif qu’aucune volonté publique ou institutionnelle n’est venue freiner depuis une dizaine d’années.
Cette crise touche particulièrement 3 zones touristiques, berceaux historiques de la pratique du surf et de l’industrie du surfwear : Biarritz-Hossegor-Lacanau.
Les sociologues ont observé que l’image surf était un formidable accélérateur de développement, on pense dernièrement à la vague de Nazaré qui est devenu un actif touristique pour la petite station balnéaire.
Ainsi, des zones comme le BAB, Capbreton-Hossegor-Seignosse ou Lacanau sont des stations balnéaires qui reçoivent du monde au delà des deux mois d’été mais également des lieux de gentrification, des sites qui attirent de nouveaux résidents, séduits par le côté petite Californie.
Tandis qu’il existe des pans entiers du littoral français qui sont encore vierges ou presque d’écoles de surf, ces zones qui sont à saturation de leur nombre de structures surf l’été depuis plus de dix ans, voient donc éclore chaque année de nouvelles écoles de surf. Cet empilement accroît évidemment la densité d’élèves de surf dans l’eau d’avril à octobre mais également précarise le métier.
En effet, si le mois d’août permet encore de faire vivre la plupart des écoles de surf, cette concurrence exacerbée rend la vie des écoles de surf présentes historiquement sur ces territoires de plus en plus incertaine. En effet, les parts de marché se réduisent, spécialement en avant et après-saison où le volume de visiteurs est modéré à faible.
Pour résumer la problématique en quelques mots : les écoles de surf peinent de plus en plus à embaucher des moniteurs qui, tout juste sortis de formation, se mettent aussitôt à leur compte sur le pas de porte des écoles qui étaient sensées les former, et qui les ont parfois exploités de manière éhontée.
Quelques planches, combinaisons, un véhicule et c’est tout ce qu’il faut pour démarrer l’activité à son compte. De là à en vivre, c’est une autre affaire si la densité d’écoles de surf explose sur un terroir donné.
Les mairies ont mis en place des procédures pour limiter le nombre d’écoles autorisées l’été sur chacun de ces territoires mais on constate que le nombre d’écoles autorisées n’a fait en réalité qu’augmenter tandis que les écoles historiques se voyaient contraintes parfois de réduire leur capacité. Saturation qui n’empêche pourtant pas de poursuivre encore ce modèle économique de l’expansion infinie, avec des écoles fraîchement créées qui marchent dans les pas de leur aînés et bombardent la plage d’autant de stagiaires qu’ils peuvent en prendre.
Et c’est sans compter les écoles non autorisées qui bénéficient de plages libres d’accès, dites zones non réglementées. Les tours operators tels que Pure Surfcamp ou Wavetour, genres de Mac-Donalds du surf, implantés en Hollande, Allemagne ou Autriche et qui, parce qu’ils se privatisent des moitiés de campings et de villages vacance, se voient dérouler le tapis rouge. D’autres écoles italiennes, tchèques, belges ou espagnoles opèrent en toute discrétion sur ces zones non surveillées, sans que l’on sache si elles se conforment aux règles de sécurité auxquelles sont assujetties les écoles immatriculées en France.
Ainsi, sur Capbreton-Hossegor-Seignosse, on doit au mois d’août dénombrer une bonne centaine de moniteurs de surf, qu’ils soient autorisés ou non par les mairies, qu’ils aient l’agrément de la jeunesse et sports ou non et je ne compte pas le prof de surf autoproclamé qui n’a aucun diplôme. Multiplié par 8 élèves, on a à l’eau au même moment parfois 800 élèves sur 6 kilomètres, puisque les zones de baïne sont impropres à la pratique du surf, en particulier pour des débutants.
Comment reprocher à un jeune du coin de vouloir monter son école là où il a ses racines, comment en vouloir au Breton qui veut monter une école à Hossegor parce que l’eau y est plus chaude et la saison plus longue ? Malgré les tentatives de régulation, l’argument du « premier au spot » n’est pas juridiquement recevable ; même si cela met en péril certains socio-professionnels. Les plus anciens ont alors l’impression que l’on vient manger dans leur assiette et les pousser dans le caniveau.
Le prochain pallier, j’en ai peur, pour vivre de cette activité et résister à la concurrence, ce seront des cours médiocres à faible coût et la pizza offerte au bout du dixième cours.