Diagnostic Eco-Safe Surfing, part 7 : gestions municipales des conditions d’accès aux plages des écoles de surf
L’histoire du surf en France est relativement récente, aussi l’explosion du nombre de pratiquants date d’une vingtaine d’années. Face à ce phénomène, les mairies sont dans une démarche de prévention des risques. En l’absence de précédents, chacune d’entre elles a donc mis en place des procédures diverses pour tenter d’endiguer le phénomène, sous forme de dossiers de candidature et d’arrêtés municipaux. Par la force des choses, cette réglementation nouvelle et quelque peu expérimentale crée de la contrainte sur l’activité des écoles de surf.
Ainsi, selon l’enquête du Conseil Départemental de 2016, parmi les problèmes principaux rencontrés par les écoles de surf:
« Enfin, la majorité des écoles de surf ont recensé des problèmes de réglementation (autorisations municipales qui nuiraient à la liberté d’entreprendre) mais aussi un manque de prise en compte de l’activité surf sur le territoire (le surf simplement utilisé comme une image et non comme un actif territorial) ».
- Les conditions d’accès, différentes selon les communes, sont ainsi perçus par les écoles de surf :
Libres : certaines municipalités ne limitent pas l’activité des écoles de surf, elles n’imposent pas de dossier de candidature, une simple déclaration d’exercice suffit, assortie des justificatifs professionnels. Il s’agit généralement de communes où le partage de l’espace plage est peu problématique, n’étant pas encore saturé d’écoles de surf. Dans ces communes, les écoles se partagent l’espace en bonne intelligence.
Proactives : dans quelques communes, en concertation avec les élus, c’est une association d’écoles de surf qui gère la problématique des autorisations estivales, quand la pression du nombre d’écoles l’exige. Là, les écoles sont considérées comme des experts à consulter sur les questions de sécurité et de gestion des plages.
Souples : la réglementation par arrêté municipal s’exerce dans la limite d’un cadre juridique strict et vient contrôler l’aspect sécuritaire de chaque école (diplômes, carte pro valide, responsabilité civile, moyens d’assistance). Là, il n’y a pas de zonage ni de limite de moniteurs par école de surf. Les rapports entre la municipalité et les écoles de surf sont ressentis comme étant basés non sur la contrainte mais plutôt sur la confiance. Une reconduction tacite des autorisations a lieu chaque année, en l’absence de comportement inapproprié.
Inégalitaires et contraignantes : là, on s’écarte de ce cadre juridique purement sécuritaire (c’est cela qui permet à une mairie de limiter le libre accès au littoral, principe du droit français) pour exiger des contreparties diverses de la part des écoles, parfois financières, la possession d’un label, la divulgation des informations internes de l’entreprise. Avec à la clef l’agrément d’un nombre variable de moniteurs par école et l’attribution de telle ou telle plage, inégalement favorables à la pratique du surf.
Ici, les dossiers de candidature créent un malaise et sentiment d’injustice de la part des écoles de surf car ils viennent amplifier les inégalités de fait entre divers types de structures : entre les privés et les clubs, entre les grosses et petites écoles, ceux qui ont des aides de la mairie comme certaines associations et ceux qui n’en ont pas, ceux qui n’ont pas de label et ceux qui ont tous les labels car ils sont en capacité financière, ceux qui n’ont droit qu’à un seul moniteur tandis que le concurrent en a deux, ceux qui ont un local fixe ou ceux qui fonctionnent en itinérance, sans parler de ceux qui ont une concession.
Coûteuses : lorsque l’autorisation est conditionnée par le paiement de taxes, cela peut également faciliter la concentration de l’économie de l’enseignement du surf aux mains d’entreprises engagées dans une politique d’expansion agressive (grosses structures écoles de surf, multinationales du surfwear).
Certaines communes justifient le paiement de ces droits d’accès payants prohibitifs par l’attribution d’une concession de plage à chaque école. Le choix de prendre une concession de plage devient alors un « choix » imposé. On n’est plus du tout dans le développement durable : les coûts de fonctionnement élevés obligent chaque école à bombarder la plage de cours de surf pour rentabiliser leur business, aggravant la saturation de l’espace. Alors que certaines d’entre elles avaient précédemment une stratégie commerciale plus raisonnée.
Précarisantes : quand l’autorisation peut être retirée d’une année sur l’autre, à deux mois de la saison, les entreprises écoles de surf s’en trouvent fragilisées, en particulier celles qui ont une concession de plage.
- Le GIP Littoral Aquitain veut créer un modèle commun sur toute la côte, sous forme de guide, pour aider les mairies dans leur gestion des écoles de surf, tâche délicate dans la mesure où il faut trouver un juste équilibre entre limitation réglementaire et liberté d’entreprendre.
Il semble que ce guide ait l’ambition de préserver des principes de justice, d’égalité et de diversité du tissu social et entrepreneurial tout en garantissant la sécurité des usagers de la plage. Un guide qui devrait s’inspirer de procédures déjà existantes, mises en place par quelques municipalités.
Une inquiétude des acteurs de la filière écoles de surf, c’est que certains modèles existants affaiblissent les petites ou moyennes structures au bénéfice d’une stratégie de monopole des entités les plus grosses, à l’image de la grande surface causant l’extinction du petit commerce.
De plus, tandis que la réglementation des écoles se fait de plus en plus lourde, ne cesse pourtant de s’accroître le nombre des écoles nouvellement autorisées.
En outre et quelle que soit leur taille, les écoles de surf, sous la pression des prix cassés (uberisation de la profession), de nouvelles taxes, labels et autres contraintes réglementaires se font du soucis pour leur avenir et souhaitent participer à l’élaboration de ce modèle global de gestion des plages.
Conscientes que l’accès aux plages doit être réglementé en prévision du jour prochain où cet espace aura atteint son niveau maximal de saturation, Eco-Safe Surfing a réalisé ce diagnostic pour que les problématiques des écoles de surf soient connues et que leur expérience de terrain profite à la collectivité.