Les écoles de surf ont des formes juridiques et des modes de fonctionnement très diversifiés. Certaines politiques peuvent donner le sentiment de favoriser les associations au détriment des structures privées. D’autres dispositifs réglementaires, de vouloir affaiblir les travailleurs indépendants. Eco-Safe Surfing a voulu prendre le contre-pied de toutes ces querelles lénifiantes en voulant représenter toutes les écoles de surf, clubs, privés, concessions de plage, écoles de dur, itinérants, multi-activités.
Néanmoins, ces écoles aux formes diverses sont concurrentes sur un même espace et force est de constater que les conditions d’accès à la plage et aux formations ne sont pas toujours très égalitaires. Pour dépasser les clivages, nous allons tenter de décortiquer certaines orientations structurelles.
La formation au service des uns
Certaines formations ne sont ouvertes qu’aux clubs, comprendre “association labellisée FFS participant au calendrier des compétitions”, à l’exclusion donc des structures privées mais également des “clubs loisir”.
L’enquête DRJS 2008 préconise d’améliorer la communication à destination des clubs et écoles labellisées, qu’en est-il des autres écoles, pourtant majoritaires !? Le renforcement des dispositifs de formation vise également à professionnaliser les futurs salariés des structures… associatives affiliées à la FFS. Citation du rapport, “Former les moniteurs de surf sur le long terme”, propositions émises :
“o La FFS développe un service d’appui aux clubs en termes de projet associatif (encadrement à l’année, projet pédagogique pour le scolaire et le périscolaire, projet fédéral, vie associative, etc.).
o La FFS met en place un système permettant de renforcer la formation des salariés des clubs. La professionnalisation des associations permet de renforcer et de légitimer le discours et les valeurs de la FFS (Lutter contre la déperdition du discours fédéral dans les écoles de surf, notamment dans les entreprises).
o Enfin, la FFS propose un système de formation à destination des dirigeants élus des associations. L’ambition est ici de « professionnaliser » (entendu ici comme rationaliser) les décisions administratives, de gestion, de recrutement, etc. au sein des clubs”.
Pourquoi pas, mais que propose-t-on aux autres types de structures en terme de formation et d’échange ?
L’adjudication au bénéfice des uns
Évoquons à présent les conditions d’adjudication : il s’agit de la réglementation mise en place par chaque mairie pour autoriser un nombre limité d’écoles à exercer sur ses plages. Le rapport DRJS 2008 préconise une mesure pour le moins inégalitaire :
“Une possibilité de rationalisation des procédures d’adjudication pourrait être la suivante :
1-les écoles commerciales candidatent en début de saison auprès des municipalités,
2-les écoles sélectionnées paient une taxe à la municipalité (au prorata de l’espace mis à disposition et du nombre de moniteurs prévus par exemple),
3-le montant des taxes obtenu sert à financer les associations locales pour développer à l’année le surf de compétition, le surf pour tous, les entrainements des surfeurs du club, etc”.
En effet, à l’image des écoles privées, la plupart des clubs proposent également une activité commerciale, en émettant des offres de type stages de surf à destination des vacanciers. La saisonnalité de l’activité, de même que des prestations peu différenciées font que la frontière entre l’action des clubs et celle des privés est finalement assez mince.
Le rapport de la DRJS reconnaît d’ailleurs cet état de fait :
“Alors qu’assez logiquement les écoles commerciales déclarent avoir une activité quasi exclusive en période estivale, il apparaît que de nombreux clubs labellisés opèrent des modes de fonctionnement similaires. Aussi, comme nous l’avions formulé ailleurs, « sous couvert d’un statut associatif, des écoles associatives se révèlent être de véritables entreprises à but lucratif pour les périodes estivales ». Autrement dit, le club n’est-il qu’un « prétexte » à l’emploi en période estivale ? Comment le discours fédéral ordinaire du sport en France est-il promulgué ?”.
Toutefois, cette proposition est nuancée puisqu’il s’agirait de reverser le produit de cette taxe aux clubs qui ne pratiquent pas d’activité commerciale concurrentielle. Entretient réalisé en 2009 par Christophe Guibert, dans le cadre d’une étude, Les effets de la saisonnalité touristique sur l’emploi des moniteurs de sports nautiques dans le département des Landes :
“Une piste proposée par le Président du Comité Départemental consiste à établir un forfait à l’égard des entreprises souhaitant offrir des cours de surf, lequel permettrait aux municipalités de subventionner les associations afin de pérenniser les emplois : On a commencé à y réfléchir ! C’est que les écoles privées paient une sorte de patente, qu’ils aient une plage l’été moyennant quoi cette patente serait reversée au club local. Auquel cas, le club, lui, arrête d’être commercial et d’être concurrentiel des écoles privées”.
Clubs et privés, des orientations communes
Les clubs sont déjà favorisés par des avantages financiers (subventions) et en nature (locaux gratuits, écoute bienveillante des pouvoirs publics), qui leur permettent d’exercer une concurrence pour le moins déloyale sur le terrain des stages de surf. Aussi, il serait proprement hallucinant d’aller taxer les entreprises privées pour aller alimenter les caisses des clubs qui les concurrencent !
Certes, tous les clubs ne vivent pas des stages de surf. Cependant, les associations ont le droit d’exercer une activité commerciale, sous certaines conditions, tel que le rappelle le rapport 2008 :
“Les associations peuvent tout à fait légalement exercer des activités commerciales.
Elles sont alors soumises au droit commun du code de commerce et ont en outre l’obligation spécifique, conformément à l’article L. 442-7 du Code du commerce, de mentionner dans leurs statuts, si tel est le cas, l’exercice habituel de leurs activités marchandes.
Au plan fiscal, les associations exerçant à titre habituel une activité lucrative sont assujetties aux impôts et taxes commerciaux (IS, taxe professionnelle, TVA), dans tous les cas où elles exercent leur activité sur un marché concurrentiel et où elles fonctionnent comme une entreprise purement commerciale. Seules les associations réservant leurs prestations à un public spécifique et exerçant une activité sociale sans but lucratif bénéficient d’un régime d’exonération fiscale.
Par ailleurs, si une entreprise commerciale estime être victime localement de concurrence déloyale de la part d’associations, elle peut engager une action contentieuse devant le juge civil sur la base des articles 1382 et 1383 du code civil. Il importe dans ce cas qu’elle puisse démontrer la réalité du dommage à son activité (baisse du chiffre d’affaires par exemple) et le lien de causalité entre l’activité de cette ou ces associations et la baisse du chiffre d’affaires en résultant pour son entreprise. Les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent intervenir dans les cas de publicité trompeuse, en application de l’article L. 121-1 du code de la consommation, ou d’infraction aux dispositions sur le démarchage à domicile (articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation)”.
De la même manière que des clubs occupent le terrain des activités commerciales estivales, certaines écoles privées encadrent des jeunes à l’année ou encore forment des compétiteurs de haut niveau. Il semble alors vain de diaboliser les uns ou les autres, puisque tous poursuivent une même mission d’éducation par le sport.
Toutefois, il est indéniable que les associations bénéficient d’avantages économiques liés à leur statut juridique. Aussi, à l’heur où les pouvoirs publics parlent de développement durable et de cohésion sociale, la réflexion sur la formation et la réglementation doit non pas viser à renforcer les uns au détriment des autres mais à préserver l’égalité de tous. L’espace plage est un espace de plus en plus saturé, il est important pour l’avenir de la profession de créer des conditions d’accès équitables et justes (formation, adjudications, réglementation) pour que tous puissent travailler harmonieusement.
Notre association souhaite en finir avec les guéguerres stériles, qui paralysent les écoles de surf, afin de trouver ensemble des solutions pour le bien commun de la profession.